samedi 22 avril 2017

L'estime de soi: comment ça fonctionne et comment l'augmenter



En 1890, William James publie un livre intitulé Principes de psychologie. Le bouquin est énorme. Il fait plus de 1300 pages. Autant vous dire que je n’ai pas eu le courage de tout lire. D’autant plus que pour moi, William James c’est un peu le Aristote de la psychologie.
 
Mais comme même une horloge cassée donne la bonne heure deux fois par jour, il y a quand-même une phrase parmi les 1300 pages de cet ouvrage qui a retenu l’attention des psychologues. Cette phrase, glissée presque furtivement au milieu du pavé, concerne le fonctionnement de l’estime de soi.

Le rôle de l’estime de soi

On peut définir l’estime de soi comme la considération qu’on a pour soi-même.
Autant dire que c’est important, parce que si on n’aime pas quelqu’un, on n’est pas forcément obligé de le supporter toute la journée. Mais si on ne s’aime pas soi-même, si on n’aime pas ce qu’on est, les conséquences sont plus graves...

Quand on a une bonne estime de soi, ça revient à se considérer comme quelqu’un de bien, de valable. Une mauvaise estime de soi signifie au contraire qu’on se considère comme quelqu’un qui ne vaut pas grand-chose, qui n’apporte rien, qui ne manquerait à personne, voire, dans les cas les plus extrêmes, on peut en arriver à penser que le monde se porterait mieux sans nous.

L’estime de soi, c’est la considération qu’une personne a pour elle-même.

Vous imaginez sans peine jusqu’où ça peut mener. Une mauvaise estime de soi est caractéristique de la dépression et en constitue souvent la porte d’entrée (Sowislo & Orth, 2013).
Les personnes qui manquent d’estime pour elles-mêmes peuvent aussi avoir tendance à se négliger. Elles cessent de porter attention à leur apparence physique et à leur hygiène de vie, voire même à leur hygiène tout court et à leur santé.
Une mauvaise estime de soi entraîne également souvent une diminution de la confiance en soi, de l’anxiété et des difficultés à s’affirmer.

Bien entendu, tous ces signes sont proportionnels au manque d’estime de soi ressenti. Dans les cas les plus légers, on va « juste » déprimer un peu de temps en temps et passer tout le week-end en pyjama, alors que dans les cas les plus graves, ça peut aller jusqu’au suicide.

Il est donc important d’avoir une bonne estime de soi.
Cependant, attention à ne pas basculer dans le narcissisme. Le narcissisme ressemble à une estime de soi démesurée, mais en réalité il s’agit surtout d’un mécanisme de défense qui masque au contraire une estime de soi défaillante. Une bonne estime de soi, c’est une estime de soi positive, mais aussi une estime de soi solide.

J'ajouterai que si l'estime de soi est nécessaire pour être heureux, elle n'est pas suffisante. Il y a bien d'autres conditions à remplir. Mais disons que si on a une bonne estime de soi on a déjà fait une bonne partie du chemin.
 

Fonctionnement de l'estime de soi

Pour en revenir à William James, selon lui l'estime de soi est le résultat d'une fraction toute simple, dont le numérateur est constitué de nos succès et le dénominateur de nos prétentions.

 
Si vous vous rappelez de vos cours de maths, il y aurait donc deux façons d'améliorer l'estime de soi : en augmentant ses accomplissements, ou alors en diminuant ses prétentions, c'est à dire en renonçant à certaines choses importantes pour nous.

Pour mieux comprendre ce que ça représente, imaginez un axe qui représente l'accomplissement personnel.

Sur cet axe, chaque personne place un premier point là où il estime se trouver actuellement. Ce point correspond à la représentation de son soi actuel. Aujourd'hui, à cet instant t, voilà ce que j'ai accompli.

Forcément, plus on aura le sentiment d'avoir accompli des choses au cours de sa vie, plus ce point sera élevé. Mais pour l'estime de soi, contrairement à ce qu’on pourrait imaginer, ça n'a aucune importance. Ce qui compte, c'est la distance qui sépare ce point d'un second, plus haut, qui correspond à nos prétentions.

Ce second point représente ce qu'on aimerait être, autrement dit le soi idéal.

Le soi idéal est composé de tout ce qui a de l'importance à nos yeux. Par exemple le fait d'obtenir tel ou tel diplôme, d'avoir des enfants ou encore d'avoir 50 000 followers sur Instagram.
Du coup, le soi idéal constitue une sélection, dont on exclue tout ce qu’on considère sans importance. Par exemple, dans mon soi idéal à moi, il n'y a rien qui concerne le foot ou la culture. Ce qui fait que j'en ai rien à faire d'avoir deux pieds gauches ou d'être une quiche à questions pour un champion. Je ne me sens pas nul à cause de ça, parce que j’ai choisi d’autres intérêts et ceux là n’affecteront pas mon sentiment de valeur personnelle.
Par contre, si un jour j’apprends que 3/4 des spectateurs de cette vidéo détestent mon travail, là je vais me rouler par terre et pleurer.

Pour en revenir au schéma, plus il y a de distance entre le soi actuel et le soi idéal, autrement dit entre ce qu'on est et ce qu'on voudrait être, et plus l'estime de soi est faible.
Au contraire, plus ces deux points sont proches, ce qui revient à rapprocher le résultat de la fraction de William James de 1, plus l'estime de soi est élevée.

En fait, pour gagner en estime de soi, il n’est pas forcément nécessaire d’augmenter ses accomplissements.
On peut aussi choisir de renoncer à certaines prétentions. Et dans son bouquin, James met particulièrement l'accent sur ce dernier point, en insistant sur le soulagement qu’on ressent lorsqu’on abandonne un but inaccessible, comme la quête pour rester jeune par exemple, et que l’on finit par s’accepter tel qu’on est.

« Comme nous trouvons plaisant le jour où nous abandonnons la lutte pour rester jeunes – ou minces ! Merci mon dieu, disons-nous, ces illusions sont parties. Tout ce que l’on ajoute au Soi est un fardeau autant qu’une vanité. » William James

Avec un exemple, vous verrez que je viens juste d'enfoncer une porte ouverte. Si on imagine une personne qui aspire à se marier, avoir des enfants, un bon niveau de revenus et être propriétaire d'une maison, vous vous doutez que si cette personne atteint ces objectifs elle se sentira bien dans sa peau.
Au contraire, si elle se retrouve seule, sans emploi dans un appartement hlm et sans enfant, elle va forcément avoir une mauvaise estime de soi.

Si on reprend la fraction de James, plus ces deux points sont éloignés, plus le numérateur est faible par rapport au dénominateur, et donc plus le résultat est proche de 0. Au contraire, plus ces deux points sont rapprochés, plus le numérateur se rapproche du dénominateur et donc plus le résultat s'approche de 1.

D'ailleurs au passage, on n'aura jamais plus que 1, parce que pour ça, il faudrait que le numérateur soit plus élevé que le dénominateur. Et ça n'arrive jamais, parce que même dans les cas où l'on atteint nos aspirations, on se débrouille toujours pour en trouver de nouvelles.
 

Comment améliorer l'estime de soi ?

Pour améliorer l'estime de soi, l'idée c'est de rapprocher ces deux points. Donc soit on diminue nos prétentions en renonçant à certains buts, soit on monte le second point.

Dans le premier cas, il s’agira de faire le tri pour trouver ce qui compte vraiment pour vous et laisser de côté ce qui n’est pas si important. Dans le second cas, il s’agira de focaliser votre énergie sur les choses qui comptent vraiment à vos yeux, au lieu de vous disperser sur des choses qui n’ont pas d’importance.

Dans les deux cas, cela demande d’identifier ce qui compte vraiment. Qu’est-ce qui est important pour vous ? Quelle personne aimeriez-vous être ? Vous pourriez essayer de faire une liste, mais à tous les coups, il va y avoir deux problèmes. Soit vous allez oublier des trucs, soit vous allez la remplir de choses qui n’ont pas tant d’importance que ça.

Alors, pour éviter ça, je vais vous montrer une liste de valeurs qui est très fortement inspirée de l’excellent bouquin « guérir l’anxiété » de la collection « pour les nuls. » Dans cette liste, vous allez commencer par choisir les 5 valeurs les plus importantes à vos yeux. Ça va sûrement être difficile d’en choisir seulement 5, mais c’est important que vous respectiez cette limite.
Mettez la vidéo en pause pour bien prendre le temps de choisir, et je vous conseille aussi de les noter quelque-part si vous avez de quoi écrire sous la main. Puis, quand vous aurez choisi les cinq valeurs qui comptent le plus à vos yeux, comparez-les à votre quotidien. Pour ça aussi, mettez la vidéo en pause et prenez le temps de répondre aux questions qui s’affichent à l’écran.

Bien entendu, ça ne suffira pas. Identifier ses valeurs, c’est comme fixer la destination d’un voyage. Une fois que c’est fait, il reste encore tout le chemin à parcourir. Mais au moins, ça vous permettra de vous situer, et surtout, d’éviter de vous perdre.
 

Sources

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