vendredi 28 juin 2013

Le roi Joffrey est-il un psychopathe ?

Le roi Joffrey est-il un vrai, un authentique psychopathe ?
Tous les fans de la série Game Of Thrones détestent le jeune Joffrey Baratheon. Il est odieux, capricieux, caractériel, égocentrique... Et en plus, tout le monde doit lui obéir puisqu'il est le roi.

Bref, c'est un vrai méchant. Mais cette personnalité est-elle inventée de toute pièce ? Est-elle uniquement le produit de l'imagination fertile de George R. R. Martin, l'auteur du roman original ? Ou s'agit-il d'un profil de personnalité qui existe en réalité ? La perspective fait froid dans le dos. Et pourtant...
 

Un psychopathe, c'est quoi ?

Si à l'origine le terme de psychopathie englobait n'importe quelle maladie mentale, aujourd'hui il fait référence à un type de personnalité bien particulier.

Hannibal le cannibale, le célèbre tueur en série de la saga Le silence des Agneaux, joué par Anthony Hopkins
Quand on imagine un psychopathe, on se représente tout de suite un tueur en série. On pense à Francis Heaulme, le "routard du crime" ou à Hannibal Lecter, personnage fascinant et effrayant de la série de livres et films le silence des agneaux.

Mais en réalité, les psychopathes ne sont pas tous des meurtriers. Heureusement, car ce profil de personnalité se retrouve chez 3% des hommes et 1% des femmes. La plupart sont bien intégrés dans la société. Ils paient leurs impôts, font leurs courses, vont au travail et n'ont jamais agressé personne, du moins physiquement.

En fait, il s'agit même d'un type de personnalité valorisé dans nos sociétés occidentales, où pour réussir il ne faut pas hésiter à écraser ses concurrents et/ou collègues. Si bien que beaucoup de psychopathes se retrouvent à des postes clés d'entreprises ou d'administrations, avec un statut élevé et de grandes responsabilités.

Le professeur Robert Hare, considéré par certains comme le spécialiste mondial de la psychopathie, a dressé un portrait-robot du psychopathe. Le profil type regroupe les caractéristiques suivantes :
  • Beau-parleur. Il sait comment embobiner les gens et ne se prive pas de les manipuler.
  • Narcissisme. Le psychopathe a une haute idée de lui-même et considère que les autres doivent l'admirer. Il pense mériter des honneurs particuliers sans avoir à faire d'efforts pour les mériter et a un grand appétit de pouvoir.
  • Difficulté à ressentir des émotions et des sentiments. Incapable de ressentir de l'empathie, ça ne lui pose pas de problème de faire souffrir les autres. Il n'en éprouve aucun remords.
  • Impulsivité. Il agit souvent sur des coups de tête, ce qui peut entraîner un danger pour lui-même ou son entourage.
  • Failles de raisonnement logique. Les psychopathes ne sont pas tous des êtres à l'intelligence supérieure. C'est même plutôt rare. Et même quand c'est le cas, leur discours comporte souvent des incohérences.
  • Agressivité. Ils conçoivent la vie comme un jeu à somme nulle, dont on ne peut sortir gagnant qu'à condition de faire perdre son ou ses adversaire(s). Et pour cela, tous les moyens sont bons.
  • Paranoïa. Le psychopathe se méfie de tout le monde.
Le roi Joffrey correspond étroitement à cette description. Néanmoins, elle reste trop vague. Pour un diagnostic plus formel, je vous propose de rentrer un moment dans la peau d'un psy et d'ouvrir l'évangile selon l'Association Américaine de Psychiatrie : le DSM, pour Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders. En français, cela donne Manuel Diagnostique et Statistique des Troubles Mentaux.

Le DSM 5 est la dernière version parue à ce jour du célèbre manuel de diagnostic édité par l'association américaine de psychiatrie
Ce fameux manuel a fait couler beaucoup d'encre ces derniers temps, et continue encore, avec la parution récente de sa cinquième édition en mai 2013. Beaucoup de reproches lui sont adressés. Notamment, le comité de rédaction a été accusé de collaborer avec les laboratoires pharmaceutiques. D'autres lui font le procès d'élargir tellement les critères de certains troubles mentaux que tout le monde pourrait se voir accoler un diagnostic psychiatrique.

Il n'est pas question ici de rentrer dans la polémique. Le DSM est fatalement imparfait puisque tout un tas de phénomènes neuro-socio-psychologiques participant à la souffrance psychique demeurent encore à ce jour peu ou pas connus. Mais force est de reconnaître qu'il s'agit d'un moyen relativement objectif d'établir un diagnostic de psychopathologie.
 

Critères du DSM IV TR

Plus haut, j'ai écrit que la dernière version du DSM était la cinquième. Cependant, vu les contestations citées plus haut, nous allons nous contenter de la version précédente, le DSM IV TR... Bon OK, la vraie raison c'est que le DSM 5 coûte environ 150 $ sans compter les frais de port pour le faire venir d'outre-Atlantique et que je suis radin.

Dans le DSM, on n'utilise pas le terme psychopathe. On parle plus techniquement de personnalité antisociale. Pour être labellisé "personnalité antisociale" dans le DSM IV TR, il faut remplir les conditions suivantes :
  1. Avoir au moins 15 ans.
  2. Mépriser et transgresser les droits d'autrui, notamment par au moins trois des modes suivants :
    • Comportements illégaux ;
    • Mensonges répétés, par profit ou par plaisir ;
    • Impulsivité ;
    • Irritabilité et/ou agressivité ;
    • Mise en danger de soi et/ou d'autrui ;
    • Irresponsabilité ;
    • Absence de remords.
  3. Manifester un "trouble des conduites" avant l'âge de 15 ans (cruauté envers des personnes et/ou des animaux, destruction de biens d'autrui, vols, intimidation, etc.).
  4. Enfin, ces comportements antisociaux ne doivent pas survenir exclusivement pendant l'évolution d'une schizophrénie ou d'un épisode maniaque.
Si vous vous êtes reconnu dans ces critères, c'est mauvais signe... pour votre entourage.

Ces critères s'appliquent-ils au roi Joffrey ?

Si l'on en croit la page dédiée à Joffrey Baratheon sur A Wiki Of Ice And Fire (attention si vous consultez cette page, vous risquez de vous spoiler), il ne fait aucun doute que celui-ci manifeste un trouble des conduites. Notamment, alors qu'il était encore un petit enfant, il aurait tué une chatte enceinte avant de lui ouvrir le ventre pour voir les chatons à l'intérieur. Il aurait aussi maltraité son petit frère Tommen.

Rappelez-vous également de ce passage, lors duquel Joffrey annonce à sa promise Margaery qu'il aime chasser, qu'il éprouve du plaisir à tuer des animaux à l'arbalète. Il suggère même vouloir tenter l'expérience avec un être humain. Plus tard, il met ce fantasme à exécution, en faisant ligoter une prostituée dans sa chambre avant de la mettre à mort.

Les preuves de son irritabilité/agressivité de manquent pas non plus. Souvenez-vous de ce passage où il fait couper la langue d'un troubadour, pour la simple raison que sa prestation lui avait déplu. Ou dans le tout dernier épisode de la saison 3, lorsqu'il trépigne devant son oncle Tyrion en criant "Ne me parle pas comme ça. Je suis le roi." et que son grand-père Tywin le remet à sa place, "Un homme qui a besoin de rappeler qu'il est le roi n'est pas un vrai roi."

Joffrey n'est pas non plus du genre à éprouver du remords. Au contraire, il se délecte de la souffrance qu'il inflige. L'exemple le plus criant est sans doute le passage où il force Sansa à regarder la tête décapitée de son père, qu'il a fait exécuter alors qu'il avait promis le contraire.

Parmi les critères du DSM IV TR que je vous ai retranscrits plus tôt, il est donc évident que Joffrey remplit les numéros 2 et 3.
N'étant pas sujet au délire, ne perdant jamais pieds avec la réalité, nous ne pouvons pas dire qu'il est schizophrène. Il n'est pas non plus sujet aux épisodes maniaques. Il remplit donc également la condition numéro 4.

Donc le seul élément qui nous empêche de diagnostiquer Joffrey comme un psychopathe, c'est son âge. Grosse déception. Le roi Joffrey n'a pas les quinze années requises pour être diagnostiqué comme psychopathe. Et à force de se faire détester, je ne suis pas sûr qu'il parvienne jusqu'à son quinzième anniversaire.


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mardi 4 juin 2013

Un exercice simple anti-déprime


Si vous faites partie de ceux qui ont pu visionner l'épisode de Game Of Thrones diffusé cette semaine (saison 3 épisode 9), vous avez dû vous payer une bonne déprime.

Pour éviter de "spoiler" l'épisode, on peut le résumer comme ceci : "Adieu veau, vache, cochon..."
En attendant que ces %@# de Lannister finissent par payer, je vous propose un exercice anti-cafard. Avouez que c'est le moment idéal.

L'idée est toute simple, il s'agit de tenir un journal dans lequel vous écrirez chaque jour (ou du moins les jours où ça ne va pas) trois choses qui ont bien été dans la journée et pourquoi, en remarquant tout particulièrement votre propre contribution.
En d'autres termes, pour ce dernier point il s'agit de mettre en avant le rôle que vous avez joué dans la survenue de ces trois événements positifs, même dans les cas où vous avez l'impression que votre action est négligeable.

Voilà, c'est tout. Simple, hein ? On croirait presque avoir affaire à une de ces techniques frelatées de développement personnel de bas étage du type méthode Coué (« Chaque jour et à tous points de vue je vais de mieux en mieux… », beurk !).

Et pourtant ça marche. Une recherche a permis de vérifier l'effet de cet exercice pour des personnes sévèrement déprimées. Après quinze jours d'utilisation quotidienne, 92% se disaient plus heureuses, avec une moyenne de diminution de 50% des symptômes de dépression. Une efficacité comparable à la psychothérapie ou aux antidépresseurs.


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