jeudi 9 janvier 2014

Comment réagit-on lorsqu'on se sent menacé ? 2/3 : flight

Résumé de l'épisode précédent : vous êtes un homme / une femme des cavernes et vous tombez nez à nez avec un tigre à dents de sabre. Comment réussir à survivre ? Vous pensiez que l'animal ne vous avait pas encore vu, vous avez donc tenté d'éviter de vous faire remarquer (freeze). Manque de bol, ça n'a pas marché. Le tigre vous a repéré.

Alors que le suspens est à son comble (si si, je suis sûr que vous n'en avez pas dormi de la nuit !), je vais enfin vous révéler la suite.
Fuyez, pauvres fous !
(Si vous ne comprenez pas, c'est que votre culture geek mérite sérieusement d'être étoffée)
 

La fuite, votre roue de secours

Dans son livre Emotions Revealed (p. 154), Paul Ekman raconte une anecdote. Alors qu'il approchait un groupe de singes, la plupart d'entre eux s'immobilisaient à son approche (freeze). Mais lorsqu'il approchait encore plus, et que la direction de son regard ne laissait aucun doute sur le singe auquel il s'intéressait, celui-ci se mettait à fuir.

Revenons à notre tigre à dents de sabre et à la manière de lui échapper. Nous avons vu que le plus efficace serait d'éviter qu'il vous repère. Mais si c'est déjà fait, trop tard. Obligé(e) de trouver une autre alternative.
 
L'animal se trouve à une distance raisonnable, vous avez encore une chance de lui échapper si vous fuyez. On peut imaginer qu'avec vos petites jambes, vous aurez du mal à distancer un animal de cette taille, habitué à courir pour chasser ses proies. C'est vrai, mais quelle alternative avez-vous ? Et puis là encore, l'évolution vient à votre rescousse, par le biais d'une émotion : la peur.

La peur favorise la fuite. L'émotion de peur déclenche tout un tas de réactions corporelles qui préparent le corps à fuir de façon efficace :
  • L'augmentation des rythmes cardiaque et respiratoire permet une meilleure irrigation des muscles pour une plus grande efficacité.
  • La sudation, les fameuses "sueurs froides," refroidissent le corps et diminuent ainsi l'échauffement dû à l'effort pendant la fuite.
  • Le sang quitte les capillaires sanguins pour irriguer les grands muscles des jambes, permettant une course plus rapide mais diminuant la force et la température des autres muscles du corps : bras, mains et doigts notamment.
  • Certaines fonctions du corps non indispensables dans l'immédiat sont "éteintes", comme le contrôle de la vessie ou encore la digestion par exemple, ce qui explique la sensation de "boule au ventre" que ressentent les anxieux. 
  • Une expression faciale caractéristique se peint sur le visage. Certains pensent qu'elle sert (ou servait) avant tout à prévenir nos congénères du danger. D'autres suggèrent que les yeux grands ouverts permettent d'intégrer plus d'informations visuelles.

Les éléments qui composent l'expression faciale de peur sont : sourcils levés et rapprochés, paupières supérieures ouvertes, paupières inférieures tendues, lèvres légèrement étirées horizontalement en direction des oreilles

Au niveau mental, il se produit aussi un certain nombre de réactions :
  • vigilance accrue ;
  • "court-circuitage" des processus de raisonnement rationnel ;
  • stockage des détails de la situation avec une précision remarquable (ce qui permettra au cerveau de déclencher à nouveau une réaction de peur si il rencontre un des éléments de la scène en cours dans le futur) ;
  • concentration sur la menace potentielle et sur les moyens d'y échapper.
L'ensemble de ces réactions vise à favoriser une action efficace en cas de danger imminent pour l'intégrité physique. Il s'agit d'une réaction tout à fait adaptée aux dangers que l'on pouvait rencontrer à l'époque de l'homme des cavernes (prédateurs, feu de forêt, montée des eaux, éboulement de pierres, etc.).

Observez la réaction de peur de cette victime d'une caméra cachée qui se retrouve face à un dinosaure : d'abord il s'immobilise (freeze), puis il fuit (flight).

La fuite, c'est has been

Le problème, c'est qu'aujourd'hui il est rarement possible d'échapper à ce qui nous fait peur par la fuite. Les choses qui nous font peur nous menacent de façon plus abstraite (estime de soi, respect, etc.) ou à plus long terme (perte d'emploi, etc.).

Pourtant, si vous craignez quelque-chose, votre cerveau produira toujours cette réaction émotionnelle vous préparant à la fuite. Peu importe que cela soit approprié ou non.
 
C'est elle qui vous fera bafouiller lorsque vous parlerez devant un public, qui vous rendra mal assuré lorsque vous pratiquerez un geste technique sous le regard d'un superviseur, qui vous empêchera de dormir quand vous vous ferez du souci la nuit dans votre lit...

Ce fonctionnement se révèle parfois encore plus pernicieux, puisqu'il constitue un élément central dans le développement des syndromes de stress post-traumatique, des phobies et des troubles anxieux en général. Heureusement, de nos jours la psychothérapie se révèle très efficace pour régler ce genre de problèmes.

Mauvaise nouvelle

Arf ! Vous avez beau courir aussi vite que vous le pouvez, le tigre à dents de sabre qui vous poursuit gagne du terrain. Il va bientôt vous rattraper. Comment allez-vous faire pour vous en sortir ?
 
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